vendredi 23 mai 2014

Ils sont venus, elles sont toutes là…

Anne Sérode, Fip


















Mathieu Gallet, Pdg de Radio France a abattu hier matin, en direct de la matinale d'Inter, ses dernières cartes pour finaliser les nominations des directeurs et directrices des chaînes du groupe public (1). Le moins que l'on puisse dire c'est que M. Gallet n'utilise pas le tambour dans ses annonces de communication. D'une voix presque "basse" le nouveau Pdg a mis un certain temps à donner à l'antenne le nom de Laurence Bloch qui remplace depuis hier Philippe Val à la direction d'Inter. 

Même si Patrick Cohen (2), dans son propos liminaire à l'interview de Gallet, a pris soin de préciser qu'il n'était pas courant qu'un salarié interviewe son Pdg, on a pu sentir une atmosphère un peu tendue pour ne pas dire surprenante. Quand M. Gallet annonce (et répète) qu'il a "un projet d'entreprise et un style de management pour un projet global", Cohen ne le relance pas et Gallet n'en dira pas plus. On imagine qu'à la même place Mélanchon, Le Pen, Copé, Filipetti et tant d'autres ne s'en seraient pas sortis avec leurs seules affirmations. L'exercice n'est pas facile, le temps est compté, donc il faut avoir la lucidité d'accepter que comme ce n'est pas le "lieu" nous n'apprendrons rien. Et sur ce style de management il faudra attendre et voir pour en savoir plus. Très "corpo" Alexandra Ackoun, journaliste spécialiste des médias à France Inter a voulu s'assurer que les effectifs de journalistes ne seraient pas rognés. "Je n'ai pas d'objectif de plan de départ" l'a rassurée Mathieu Gallet. On pense aux "saltimbanques" qui eux n'ont pas de représentants et qui ne peuvent bénéficier d'une tribune pour interpeller leur patron sur l'avenir, à court terme, de leurs productions. 


Marie-Pierre de Surville, Fr. Musique














Par contre sur la définition de son rôle, le Pdg a été très clair. À la question d'un auditeur s'inquiétant du sort de Daniel Mermet à la rentrée, Gallet a précisé que les contenus n'étaient pas de son ressort et que Laurence Bloch et son équipe seraient responsables de la programmation. Plus surprenant Gallet n'a rien dit du rôle de Frédéric Schlessinger, le nouveau directeur délégué aux antennes et aux programmes, alors que paraissait, presque en simultané sur le site de LeMonde.fr, une interview où le Pdg précisait "Sa mission [à F. Sclessinger] sera surtout de veiller à la complémentarité entre nos sept chaînes. Je veux qu'elles offrent le choix le plus large possible, que les Français puissent passer leur journée sur nos chaînes en passant d'une sonate sur Musique à un flash sur Info, d'un flash sur Info à un débat sur Culture… Frédéric travaillera à créer cette offre la plus large et la plus complémentaire possible." (3)

À une autre question d'auditeurs concernant les podcasts payants, M. Gallet a affirmé son souci d' "une valorisation des services associés [dont les podcasts font partie, NDLR], et notamment que le coût de stockage des podcasts [qui incombe à Radio France] pourrait être pris en charge par le consommateur" (sic). Faisons confiance à Mathieu Gallet pour valoriser, au delà de la diffusion en flux, la richesse patrimoniale du "fonds" Radio France. Voilà une autre (r)évolution qui se prépare et qui va influer sur l'écoute en streaming et sans doute diminuer d'autant l'archivage podcast. Ne restera plus ensuite à l'Ina (comme elle le fait très bien aujourd'hui) qu'à vendre les archives radio pour les plus conservateurs d'entre nous. Sera alors venu le temps de se poser la bonne question : "Mes archives pour quoi faire ?". L'occasion m'est donnée ici de dire au Pdg de Radio France que pour la réflexion qu'il lancera il serait bon d'y associer des usagers-auditeurs, ne serait-ce que pour pouvoir confronter leurs pratiques d'écoute, d'archivage et de… réécoute.

Deux autres choses importantes ont été annoncées : la volonté du Pdg de revoir pour France Inter les émissions de fin de matinée (4), d'après-midi et de soirée. Soit la quasi totalité de la grille. Et pour Fip une annonce en demi-teinte d'un "rapprochement" avec RF8, la nouvelle plateforme musique du groupe. Dans ce dernier cas on pourrait s'inquiéter à juste titre de la disparition en flux d'une radio unique au monde. "Ya d' l'économie dans l'air" si le projet était de laisser s'engouffrer Fip dans une diffusion numérique au risque, au milieu d'une plateforme, de lui faire perdre son identité de chaîne pour celle de "ruban musical".



(1) Laurence Bloch, France Inter, Claude Esclatine, France Bleu, Bruno Laforestrie, Le Mouv’, Anne Sérode, Fip, Laurent Guimier, France Info, Marie-Pierre de Surville, France Musique. Olivier Poivre d’Arvor étant reconduit à son poste de directeur de France Culture,
(2) Anchorman de la matinale de France Inter, 7h-9h,
(3) "Mathieu Gallet, ses têtes, ses projets" par Alexis Delcambre et Alexandre Piquard,
(4) La "parenthèse attendue" du duo Lopez/Manouchian devant se refermer, n'ayant que trop plombé ce créneau horaire.

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