lundi 14 mars 2016

France, radio et télé feront-elles marque commune ?…


Les relations diplomatiques et commerciales avancent entre Radio France et France Télévisions (1) au point que les journalistes qui disposent encore de peu d'information se rabattent sur ce qui pourrait apparaitre comme le futur nom de la chaîne. Nom qui, entre les deux grands acteurs de l'audiovisuel public, radio et télé, mange du pain ! On se souvient en effet qu'à la création du site de France Télévisions, le nom choisi "francetvinfo" avait eu un peu de mal à passer du côté de… France Info.

Historique des préalables ou le feuilleton : "comment fabriquer une fusée" 
• L'air de rien, entre la poire et le fromage, François Hollande annonce fin 2013 son souhait d'un rapprochement de Radio France et France Télévisions (Commémoration des 50 ans de la Maison de la radio, 14 décembre 2013),
• Le lendemain Aurélie Filipetti bafouille que ce ne sont pas les entreprises qui devraient se rapprocher mais les sites internet (si,si, c'est possible ! Ça montre bien que pour Hollande les sociétés ou leurs sites internet c'est à peu près la même chose)
• Quelques mois après sa nomination, comme Pdg de Radio France, Mathieu Gallet, de concert avec Laurent Guimier, nouveau patron de France Info, annoncent la création d'un "service global d'infos en continu qui mélangerait la radio, la vidéo et le numérique" (novembre 2014)
Début décembre 2014, Rémy Pfimlin, Pdg de France Télévisions, confirme l'objectif de "lancer une chaîne d'informations en continu en numérique, courant 2015".

Rémy Pfimlin ©lemonde.fr













Là, on peut imaginer que dans les coursives de l'État ça commence à coincer pour ne pas dire à grogner. Effet collatéral à fragmentation lente de l'éclatement de l'ORTF (loi d'août 1974 due à la volonté du prince Giscard, Président de la République depuis moins de 80 jours), et de la création en 1975 de sept sociétés d'audiovisuel, distinctes et autonomes. On crée l'Ortf en 1964, on l'explose en 1974 et quarante ans après on envisage de reconstituer la ligue dissoute. Faire et défaire…

Reconstituer l'Ortf, Marc Schwartz l'indique de façon très claire en mars 2015 dans son rapport sur France Télévisions : "Le manque de coordination [des acteurs de l'audiovisuel public] a trouvé une expression récente lors de l'annonce, à quelques jours d'intervalle, du souhait de Radio France de disposer d'un "service global d'infos en continu qui mélangerait la radio, la vidéo et le numérique", puis de celui de France Télévisions de lancer une chaîne d'informations en continu en numérique, courant 2015… Le groupe de travail partage le diagnostic porté par plusieurs interlocuteurs d'une dispersion des moyens publics en matière d'information, qui ne dispose pas… d'une chaîne d'information en continu destinée au public français, il considère que tout projet dans ce domaine ne devrait se concevoir qu'en associant toutes les forces du secteur public, autour d'un projet commun."


Mathieu Gallet













Plus le choix, les acteurs (de l'audiovisuel public) vont devoir jouer dans la même pièce sinon gare, le rapport Schwartz est sans ambiguité ! "Face aux défis à venir, et aux contraintes croissantes pesant sur les finances publiques, il paraît nécessaire que l'État pèse davantage sur le dispositif des médias de service public. Si tel n'était pas le cas, il sera difficile d'écarter la tentation d'un rapprochement organique entre les sociétés ayant appartenu jadis à la même entité (4). La structuration actuelle qui remonte à l'éclatement de l'ORTF, à une époque où radio et télévisions publiques disposaient d'un quasi monopole, peut en effet être interrogée, à l'âge de la convergence des médias, de la transition numérique et de l'élargissement de l'univers concurrentiel à des acteurs mondiaux venus d'Internet." 


Delphine Ernotte













À son arrivée fin août 2015 comme Pdg de France Télévisions, Delphine Ernotte annonce qu'elle veut créer "une chaîne numérique d'information en continu", à laquelle seront associés tous les acteurs de l'audiovisuel public. Elle donne une date de démarrage : septembre 2016. Les tractations peuvent démarrer et elles démarrent, entre Radio France et France Télévisions qui nomment chacune un représentant chargé de bâtir de façon concertée la future chaîne. Germain Dagognet (FTV) et Laurent Guimier (F.Info).

Je suis particulièrement ce projet pour voir comment la radio va pouvoir tirer son épingle du jeu et faire valoir son expérience de trente ans d'info en continu. Et surtout comment la télé va descendre de sa tour d'ivoire pour accepter ne pas être l'opérateur unique du projet. En interne les journalistes des deux sociétés audiovisuelles ne dansent pas tous la carmagnole. Les inquiétudes sont patentes et plusieurs de se demander "qui va manger qui ?" et surtout comment chacun va pouvoir conserver son identité et/ou sa facture éditoriale ?



Quant au nom, circulait ces derniers jours, "France Info TV" qui aurait les faveurs de Mathieu Gallet et celles de Michel Field le "nouveau" directeur de l'information de France TV. Les journalistes du site "France TV info" s'insurgent contre ce nom (2). Dans l'éventualité où le nom "France Info TV" serait retenu, ce serait la reconnaissance formelle de l'anticipation de Radio France qui, en 1987 sous l'impulsion de Jérôme Bellay, créait France Info.
(À suivre)

Michel Field a le service public à géométrie variable (ajout de 9h30)
Pour parler de l'info à France Télévisions, et plus particulièrement de la future chaîne d'info en continu, Michel Field a choisi Europe 1 et "Le grand direct des médias" de Jean-Marc Morandini (3). On se pince là ! Field a-t-il bien conscience de "trahir" non seulement le service public, mais les négociations en cours entre Radio France et France Télévisions. La déontologie, le sens du service public auraient dû inciter Field à plus de discernement voire à un minimum de fair-play. Gageons que pour réparer ce faux-pas assez désastreux, Delphine Ernotte vienne très vite chez Sonia Devillers dans "L'instant M" sur France Inter.

(1) Mais aussi sans doute avec France Média Monde (France 24, RFI), Arte et l'Institut National de l'Audiovisuel (Ina),

(2) "La disparition de la marque Francetv Info, au profit d'une nouvelle entité et d'un nouveau nom, nous semble incompatible avec la volonté du groupe France Télévisions de devenir leader de l'information en continu sur le web" avait précisé la "Société des Journalistes " (SDJ) de France Télévisions, citée par le Figaro le 11 mars 2016,
(3) Pile à l'heure de L'Instant M sur France Inter. 

5 commentaires:

  1. bonjour Fanch,
    je ne sais pas où écrire cela, mais juste vous dire que je viens de lire sur le site internet du Monde, que la nouvelle Ministre de la Culture vient d'annoncer que les publicités seront autorisées sur Radio France, donc je suppose sur l'ensemble des radios ... Est-ce à dire que la matinale de Vincent Josse va être truffée le matin, de pub pour les poulets de Challans ?
    Je suis triste de lire cela.
    bon, c'est l'heure de la gamelle de l'ouvrier.
    Nanou

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  2. Rien de changé en "volume horaire", 30'/jour sur l'ensemble des chaînes, utilisées par France Inter et France Info. dans l'air une proposition pour que ni Culture ni Musique ne soient ouvertes à la pub. La différence c'est que dorénavant le champ des annonceurs est élargi et les tomobiles et autres cosmétiques pourraient "envahir" les ondes. C'est le désengagement financier de l'État qui impose d'aller chercher de nouvelles recettes. Et la ritournelle de l'État pour dire qu'il défend le service public audiovisuel est juste une pantomime.

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  3. bonjour Fanch !

    merci de ces précisions, les pubs sont une des raisons pour lesquelles je n'écoute quasiment plus France Inter. Et pourquoi cette différence entre les radio de Radio France ? les oreille pour France Culture et France Musique sont plus délicates peut être ?
    ha tout m'énerve !!!
    mais c'est vendredi, et le vendredi pour la travailleuse de base, c'est toujours mieux ...
    bon week end sous le soleil, enfin ici, météo de printemps.
    Nanou

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    1. Ola chère auditrice/lectrice passionnée vous allez bien vite en besogne. je vais faire court ! À partir du moment où la radio publique a voulu rivaliser en audience (dès la création de France Inter en 1963) elle a fini par utiliser Médiamétrie, et de ce fait a pu produire des chiffres, solliciter des annonceurs institutionnels, compléter ses ressources et c'est de fait la radio généraliste qui a capté les annonceurs.

      Pendant ce temps les auditeurs de FM et FC, ciblés, et catégotisés (CSP + etc…) n'auraient pas supporté la pub. On est là pour l'instant. Le jour où le Pdg d'Airbus, de la SNCF ou d'Areva deviendra Pdg de Radio France il y aura de la pub sur toutes les chaînes, toutes les heures et à tous les étages…

      Ce sera le temps de la "BBC à la française" que prône, entre autres, Frank Riester (Les Républicains) mais il n'y aura plus que trois chaînes de radio, et 4 chaînes de télé et des milliards de web radio (fiction ?)

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  4. je ris de votre Ola, car c'est vrai que parfois je réagis comme si je m'étais fait piquer par une guêpe, une bécasse mettant la charrue avant les bœufs ! Mais enfin dans tout ce bestiaire, je ne suis pas si loin du compte, nous les auditeurs et auditrices avons été analysés, décortiqués, mis en catégorie.
    ceci dit, vous avez raison, un jour nous ne serons plus qu'un magma informe matraqué de pub.
    Je préfère rêver que ce sera alors le retour des radios pirates !!
    il fait un temps superbe, une chaleur de printemps, et je ne vais pas tarder à plier mon barda.
    merci encore pour vos éclaircissements, et belles écoutes pendant le we !
    Nanou

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